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Lionel Sauner (Strasbourg), "L’assistance aux animaux sauvages : état des lieux philosophique" Pénélope Ehles (Strasbourg), "L'animal sauvage : entre carences et disparités juridiques" Anouk Bouhamidi (Strasbourg), "L’utilisation du cheval en centre équestre : une réalité encore acceptable ?" Déjeuner au restaurant le « Ganesha » Edwin Louis-Maerten (Bâle), "L’éthique animale sous le prisme des 3R" Sarah Zanaz (Strasbourg & Puebla), "Les enjeux éthiques de la conscience animale : le cas des animaux aquatiques" Goûter Valéry Giroux (Montréal), "Pourquoi me priver si ça ne sert à rien?" Angela Martin (Bâle), "La représentation politique des animaux" Dîner au restaurant le « Bella Vita » |
ABSTRACTS
Lionel Sauner, « L’assistance aux animaux sauvages : état des lieux philosophique »
Depuis les années 2010, la question de l’assistance aux animaux sauvages est passée de marginale à largement discutée en éthique animale. Si elle n’était est abordée que brièvement par Tom Regan, Gary Francione, Martha Nussbaum ou Joan Dunayer avant ou au début des années 2000, une nouvelle école représentée, entre autres, par Clare Palmer, Lori Gruen, Jeff McMahan, Sue Donaldson et Will Kymlicka, Brian Tomasik et Oscar Horta s’est saisie des enjeux entourant la question de l’intervention dans la nature. Lors de cette présentation, nous reviendrons sur l’ensemble de ces positions, distinguant les opposants du mouvement Reducing Wild Animal Suffering et ses défenseurs, ainsi que les argumentes avancés par chacun. Pénélope Ehles, « L'animal sauvage : entre carences et disparités juridiques » L'animal sauvage vit en dehors du domus. Il ne revêt aucune valeur sentimentale ou pécuniaire et est uniquement appréhendé en tant qu’espèce. Dans le droit, il est abordé sous le seul prisme de la composante environnementale et n'a pas de valeur intrinsèque. Son absence d'appropriation contribue sans nul doute à son absence de reconnaissance individuelle et le distingue à ce titre de l'animal domestique, captif ou apprivoisé. Pour autant, il est indispensable de lui offrir une telle protection, que ce soit en cas de préjudice, ou pour œuvrer en faveur du bien-être animal. Anouk Bouhamidi, « L’utilisation du cheval en centre équestre : une réalité encore acceptable ? » L’utilisation du cheval pour le loisir et le sport s’est largement démocratisée depuis la fin du XXe siècle, rendue accessible notamment par la pratique en club équestre. Ces établissements montrent aujourd’hui un panel très diversifié de pratiques d’équitation et de conditions de vie pour les chevaux qui, de plus en plus, se revendiquent respectueuses de l’animal. D’après l’enquête que j’ai menée au printemps 2021 auprès de 13 dirigeant.e.s de structures équestres, je propose un tour d’horizon de ce que signifie pour chacun.e le bien-être équin, et comment iels l’intègrent ou non à la gestion de leur établissement. Leur perception du bien-être, généralement conforme aux préconisations scientifiques, est parfois mise à l’épreuve dans des décisions pratiques. Par ailleurs, l’enquête révèle une peur accrue des « animalistes » de la part des gérant.e.s, qui craignent pour l’avenir de leur profession : devrions-nous cesser de monter à cheval ? Une équitation respectueuse existe-t-elle vraiment ? Mon projet de recherche a vocation à s’emparer de ces questions. Plus largement, je souhaite interroger ce qui fonde notre rapport au travail de l’animal dans le cadre équestre : peut-on dire que le cheval travaille, d’autant plus dans un contexte où l’équitation est perçue comme un loisir ? Si oui, peut-on exiger d’un animal qu’il travaille pour nous ? Malgré le manque de littérature à ce sujet, je pense conduire ma réflexion au regard des théories abolitionnistes, ou encore des concepts d’autonomie, d’agentivité et de servitude. Edwin Louis-Maerten, « L’éthique animale sous le prisme des 3R » Le principe des 3R (remplacer, réduire, raffiner) a été décrit pour la première fois par William Russel et Rex Burch en 1959 dans leur ouvrage The Principles of Humane Experimental Techniques. Ce principe a permis de poser les fondations d’une utilisation plus raisonnée des animaux en recherche expérimentale et a été inscrit dans la directive européenne 2010/63 sur la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques. C’est donc un principe majeur pour l’éthique en expérimentation animale, mais ne pouvons-nous pas aussi l’appliquer à d’autres domaines de l’éthique animale ? Dans cette optique, je présenterai quelques arguments en faveur d’une généralisation du principe des 3R et pourquoi il peut être considéré comme un outil pratique dans l’évolution de nos rapports avec les animaux. Sarah Zanaz, « Les enjeux éthiques de la conscience animale » Si les animaux non humains terrestres (mammifères et oiseaux) font l’objet d’une considération morale, juridique et scientifique croissante, les animaux aquatiques (poissons, céphalopodes et crustacés), eux, sont encore très peu pris en compte. Ils sont souvent oubliés par le mouvement animaliste lui-même, alors même qu’ils constituent la grande majorité des victimes du spécisme et de l’exploitation animale. En effet, entre 94 et 98 % des animaux vertébrés tués chaque année sont des animaux aquatiques. Dans ce contexte, cette présentation s’attachera à faire valoir, sur la base des avancées neuroscientifiques et éthologiques les plus récentes, que les animaux aquatiques sont bel et bien capables de ressentir la douleur consciemment et que certaines espèces montrent même des niveaux de conscience avancés. En outre, nous explorerons les relations qui se tissent entre des concepts tels que la conscience, la douleur et la souffrance. Pour conclure, nous aborderons la question des conséquences éthiques de pratiques telles que la pêche et la pisciculture, ainsi que les représentations culturelles qui les sous-tendent. Valéry Giroux, « Pourquoi me priver si ça ne sert à rien? À propos de l’objection de l’inefficacité du véganisme individuel pour lutter contre les torts collectivement causés aux animaux d’élevage » Les produits d’origine animale que l’on trouve sur le marché sont le résultat d’un fait accompli : les animaux dont ils sont issus ont déjà été exploités, le mal est fait. Le poulet au comptoir des viandes est mort et refuser de l’acheter ne le ramènera pas à la vie. Si l’épicier vend un poulet de moins cette semaine, cela ne signifie pas qu’il commandera un poulet de moins à son fournisseur la semaine prochaine, et même si c’était le cas, cela ne signifie pas qu’un poulet de moins sera élevé dans le futur immédiat par le fermier où le fournisseur en question fait ses achats. Le consommateur se trouve à plusieurs degrés de séparation des animaux exploités. Plus un marché est large et complexe, plus le lien causal entre le choix d’un consommateur et les décisions des producteurs s’amenuise. Un gaspillage considérable tout au long de la chaîne d’approvisionnement est anticipé et des mécanismes sont déjà en place pour absorber les pertes à chacune des étapes. L’achat d’un poulet de plus ou de moins ne peut avoir, à toute fin pratique, aucune influence sur la production. Chaque fois qu’il est tenté d’acheter un produit d’origine animale, le consommateur peut donc se dire que s’en priver ne contribuerait à épargner aucun animal. L’objection de l’inefficacité est telle que le devoir d’éviter de causer des torts aux animaux d’élevage ne semble pas forcément impliquer celui d’éviter de consommer les produits issus de leur exploitation. Pire, si ces produits procuraient ne serait-ce qu’un peu plus de plaisir gustatif à ceux qui les consomment que les options végétales, leur achat pourrait contribuer à augmenter le bien-être général et être moralement obligatoires selon les utilitaristes de l’acte. Je propose de consacrer le temps qui m’est alloué à l’examen des principales réponses qui ont été offertes à l’objection de l’inefficacité du véganisme individuel pour mitiger les dommages collectivement causés aux animaux d’élevage. J’espère arriver à montrer qu’en plus des raisons non instrumentales (déontologiques), nous avons probablement des raisons instrumentales (conséquentialistes) de nous interdire d’acheter des produits d’origine animale. Et ce, même si chacun de nos gestes individuels de consommation a infiniment peu de chances d’affecter directement les animaux (leur nombre ou leur bien-être) destinés à être exploités et tués pour les nourritures que nous en tirons. Angela Martin, « La représentation politique des animaux » Les spécialistes de l’éthique animale soutiennent depuis longtemps que les animaux doués de sensibilité comptent moralement. Avec l’avènement du tournant politique en éthique animale au cours de la dernière décennie, il a été affirmé que les animaux importent aussi sur le plan politique : la politique devrait tenir compte des animaux et de leurs intérêts. Dans cette veine, un nouveau corpus de littérature a émergé pour discuter de la meilleure façon de représenter les intérêts des animaux au niveau politique. Dans cette présentation, je discuterai plusieurs modèles de représentation politique et leurs problèmes. Je défendrai l’idée que nous avons besoin d’une représentation directe des animaux dans les parlements, sous la forme de représentants élus. En outre, je présenterai deux défis à ce point de vue : le problème du nombre (les animaux sont beaucoup plus nombreux que les êtres humains) et le problème du conflit (les intérêts des animaux peuvent être en conflit entre eux) ; je présenterai quelques réflexions sur la façon dont ces défis peuvent être dépassés. |